Cinq joueuses de curling vêtues de vestes rouges célèbrent avec un trophée tout en portant des médailles d’or.World Curling/Stephen Fisher
World Curling/Stephen Fisher

L’équipe Homan se concentre sur le processus plutôt que sur son passé victorieux dans une saison olympique sous tension

Ces dernières années, les amateurs de curling n’ont pas cessé de parler de la domination de l’équipe Homan.

Sur les saisons 2023-24 et 2024-25 combinées, elles ont enregistré 142 victoires pour seulement 15 défaites. Elles ont remporté le premier titre mondial canadien depuis 2018, puis ont enchaîné avec un deuxième sacre consécutif. Elles ont atteint la finale de chacun des cinq tournois du Grand Chelem de curling la saison dernière, remportant deux d’entre eux.

Même l’équipe Tirinzoni de Suisse, deuxième équipe mondiale et détentrice de quatre titres mondiaux consécutifs de 2019 à 2023, a reconnu l’ascension de « l’Empire Homan » — menée par la capitaine Rachel Homan, la troisième Tracy Fleury, la deuxième Emma Miskew, la première Sarah Wilkes et l’alterne Rachelle Brown.

Interrogée sur leur récente domination sur la scène internationale du curling, Wilkes la décrit comme la « cerise sur le sundae ». 

« Pour nous, tout repose sur le processus, et les victoires comme les défaites sont le résultat de notre travail et de ce que nous faisons sur la glace. »

Fleury abonde dans le même sens, soulignant l’importance de la confiance et du respect mutuel qu’elles ont développés entre coéquipières.

« Même dans les parties que nous gagnons, il y a toujours des choses à apprendre. Et que l’on gagne ou perde, nous aimons analyser chaque match et voir ce que nous pouvons améliorer pour la prochaine fois », explique Fleury.

Au printemps dernier, l’équipe Homan est devenue la première équipe féminine canadienne à remporter deux titres mondiaux consécutifs depuis celle de Sandra Schmirler en 1993-1994, rejoignant ainsi quelques noms légendaires du curling.

Si Wilkes reconnaît que c’est « un peu irréel » d’être double championne du monde en titre, elle et Fleury insistent pour attribuer cet accomplissement au fruit d’un travail acharné, une fierté pour l’équipe.

« Mais nous voulons aussi continuer à élever nos standards, à en faire toujours plus. Nous n’avons pas encore terminé », précise Fleury.

Three women curlers in red jackets prepare to welcome their teammate into a group hug
L’équipe Homan célèbre sa victoire en demi-finale contre la Corée du Sud et se qualifie pour la finale pour la médaille d’or au Championnat du monde féminin de curling 2025. (Will Palmer/World Curling)

Construire l’excellence

L’une des forces de l’équipe réside dans leur capacité à se soutenir mutuellement, dans les bons comme dans les mauvais moments. Homan et Miskew ont une longue histoire ensemble, jouant dans la même équipe depuis plus de vingt ans. Elles ont remporté leur premier titre mondial en 2017 et ont fait leurs débuts olympiques à PyeongChang 2018. Wilkes a rejoint l’équipe lors de la saison 2020-21, puis de Fleury en 2022-23, après avoir terminé la saison précédente comme capitaine la mieux classée au Canada.

Malgré leurs succès respectifs, l’intégration de Fleury au noyau des quatre n’a pas été un long fleuve tranquille.

« Je pense que notre première saison a beaucoup été expérimentale, à essayer de nouvelles choses : nous avons changé de positions et appris à mieux nous connaître et à comprendre nos forces », explique Fleury, à propos d’une saison correcte mais pas « exceptionnelle ». À ce moment-là, Fleury a été nommée capitaine, mais Homan continuait de lancer les dernières pierres. Progressivement, elles ont trouvé leur rythme et les rôles les plus adaptés à chacune.

« J’adore jouer en troisième. On fait un peu de tout : communiquer avec l’avant, balayer, et surtout, participer à la stratégie du jeu », dit Fleury. « C’est un peu comme être la caddy de Rachel, jouer ce rôle de soutien et l’aider à réaliser les derniers tirs sous pression. »

Dressed in red jackets, Rachel Homan and Tracy Fleury discuss a shot
Canada skip RacLa skip canadienne Rachel Homan (à gauche) et la vice-skip Tracy Fleury discutent d’un lancer lors d’un match du Championnat du monde féminin de curling contre l’Écosse à Sydney, N.-É., le vendredi 22 mars 2024. THE CANADIAN PRESS/Frank Gunn

Le tournoi le plus important de la saison sera sans doute les Jeux olympiques d’hiver de Milano-Cortina 2026. Mais pour les équipes canadiennes, il faut d’abord remporter un tournoi sous pression extrême : les épreuves de qualification olympique canadiennes.

Avec le parcours récent de l’équipe Homan, il serait facile de penser au-delà des qualifications et d’imaginer l’ajout d’une médaille d’or olympique à leur palmarès. Mais Fleury et Wilkes préfèrent rester concentrées sur le processus, l’entraînement et la communication.

« Ce qui doit arriver arrivera aux qualifications. Nous voulons juste y aller en sachant que nous avons fait tout notre possible pour être prêtes. Tout peut se passer cette semaine-là », souligne Fleury.

En mai, lors du Team Canada Olympic Lab, où les athlètes espérant se qualifier pour Milano-Cortina 2026 se sont réunis pour des séances d’information, Wilkes y a vu une opportunité de planification.

« Si nous atteignons notre objectif, si nous réussissons, nous serons préparées et prêtes, et nous saurons à quoi nous attendre dans les mois qui suivent, car le calendrier est très serré. »

L’événement clé avant le grand événement

Les épreuves de qualification olympique canadiennes de curling, qui se tiendront du 22 au 30 novembre à Halifax, attireront probablement plus de regards que tout autre tournoi de curling de ce cycle olympique. Par le passé, elles ont réservé quelques surprises, l’équipe favorite sur le papier ne remportant pas toujours le titre. Cet événement quadriennal possède une aura unique.

« C’est tous les quatre ans, n’est-ce pas ? Les Jeux olympiques sont notre objectif ultime. Quand on n’a cette opportunité qu’une fois tous les quatre ans, cela rend l’enjeu énorme. Tout le monde joue son meilleur curling aux qualifications, car nous voulons toutes la même chose. La compétition y est donc au plus haut niveau », explique Fleury.

« C’est une véritable pression constante », ajoute Wilkes, soulignant que l’intensité est décuplée lors de ces qualifications. « Dans n’importe quel sport, on peut se préparer autant que possible, mais la part de chance reste toujours présente. On ne peut pas tout contrôler. »

Four women curlers in red jackets and black pants walk down a sheet of ice
L’équipe Homan (de gauche à droite) Tracey Fleury, Emma Miskew, Sarah Wilkes et Rachel Homan célèbre sa victoire contre l’Écosse lors du match de qualification en séries au Championnat du monde féminin de curling 2025. (Stephen Fisher/World Curling)

Cette année, un changement majeur du format des qualifications prévoit que la finale se jouera désormais en meilleur des trois matchs, un format que Fleury et Wilkes approuvent pleinement.

« On peut perdre un match et conserver sa place aux Jeux, alors qu’un match en mort subite est beaucoup plus risqué si on est un peu en dessous ce jour-là ou si un tir ne se passe pas comme prévu », explique Fleury.

Fleury en sait quelque chose. Il y a quatre ans, elle avait perdu sa place pour les Jeux de Beijing 2022 lors d’une finale en mort subite, après avoir mené son équipe à un parcours parfait durant la ronde préliminaire. Avec la dernière pierre en main, son tir a heurté un gardien, laissant la qualification olympique à Jennifer Jones.

« Dans notre sport, c’est une des défaites les plus difficiles à encaisser. Mais pouvoir rebondir, former une nouvelle équipe et retrouver le succès a été extrêmement gratifiant », se souvient Fleury.

Wilkes souligne qu’avec une finale en un seul match, l’équipe ayant bénéficié du laissez-passer grâce à son classement en ronde préliminaire peut en réalité se retrouver désavantagée face à une équipe venant de gagner sa demi-finale, mieux acclimatée à la glace.

« Avec le format en meilleur des trois, cet avantage disparaît et les deux équipes se retrouvent sur un pied d’égalité en finale », explique-t-elle.

Quoi qu’il advienne cette saison, les membres de l’équipe Homan restent fières de représenter le Canada et d’inspirer la prochaine génération de curleuses.

« Quand je repense à moi, jeune curieuse, et que je voyais les athlètes porter la feuille d’érable, c’était tellement inspirant. Ça me remet les pieds sur terre lorsque c’est moi qui ai cette opportunité. Quand je me sens frustrée ou découragée, je repense à ça : quel honneur, et combien d’enfants nous regardent. Ça me recentre complètement », confie Wilkes.

Questions rapides avec Tracy Fleury et Sarah Wilkes

Comment décririez-vous vos coéquipières ?

Rachel Homan
Fleury : Déterminée et engagée envers la performance et l’excellence, une travailleuse acharnée.
Wilkes : Le premier mot qui me vient à l’esprit est déterminée. Tellement déterminée.

Emma Miskew
Fleury : Complète, capable de tous les tirs et toujours présente dans les moments importants. Très organisée, ce qui profite à l’équipe.
Wilkes : Gaieté et bonne humeur, toujours amusante.

Rachelle Brown
Fleury : Elle porte plusieurs casquettes, possède une grande connaissance du jeu, apporte une énergie positive et dynamique.
Wilkes : De bonnes vibrations. Elle s’occupe de tout ce qui ajoute de la pression lors des grands événements, comme suivre les tendances pour nous tenir informées sur la glace et les adversaires.

Quel est votre premier souvenir des Jeux olympiques ?
Wilkes : J’étais à l’école primaire et j’avais la varicelle, donc j’ai pu rester à la maison et regarder les Jeux. C’était Nagano, parfait timing ! Mike Harris était le capitaine de l’équipe masculine, et j’ai grandi au même club que lui.

Fleury : Sandra Schmirler remportant l’or à Nagano en 1998. Tellement inspirant.