Deux joueuses de hockey en action derrière le filet avec la gardienne de but qui surveille la rondelleAndrew Lahodynskyj/COC
Andrew Lahodynskyj/COC

« Cette occasion est un privilège » : Emma Maltais parle de sa présence au sein d’Équipe Canada et de l’effet de la LPHF

Qu’elle représente Équipe Canada ou son équipe de la LPHF, les Sceptres de Toronto, Emma Maltais est devenue une des favorites de la foule en raison de sa combativité sur la patinoire ainsi que de la forte personnalité qu’elle affiche sur la glace et en dehors.

Maltais a participé à ses premiers Jeux olympiques à Beijing en 2022, où elle a aidé Équipe Canada à ramener la médaille d’or au pays. Elle a représenté le Canada au Championnat mondial de hockey féminin de l’IIHF à quatre reprises, remportant alors trois médailles d’or et une d’argent. Elle va maintenant arborer la feuille d’érable à nouveau à l’occasion de la prochaine édition du Championnat mondial, qui aura lieu à compter du 9 avril à Ceske Budejovice, en Tchéquie. Équipe Canada cherchera alors à défendre son titre.

Olympique.ca s’est entretenu avec Maltais afin de parler de sa vie comme athlète professionnelle, de l’effet de la LPHF sur la scène du hockey féminin et de la façon dont les Jeux olympiques ont changé sa vie.

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À Milano Cortina 2026, nous vivrons de premiers Jeux olympiques depuis le lancement de la LPHF. Quel effet penses-tu que la ligue aura sur le niveau de jeu du tournoi olympique?

Je pense qu’il y aura plus de gens qui vont nous suivre et la responsabilité de donner notre meilleur niveau de performance sera plus grande. Cela a cependant toujours été le cas dans une certaine mesure aux Jeux olympiques.

Je pense aussi que la compétition pour être retenue au sein de la formation sera plus féroce. Nous jouons toutes dans cette ligue et il y a de nouveaux visages qui arrivent, ce sont des joueuses qui ont tellement de talent. Il y a beaucoup de pression associée au fait de garder son poste. Il faudra aussi trouver une façon de créer une bonne dynamique d’équipe dans le contexte de cette pression.

Il y a beaucoup d’éléments qui vont entrer en jeu, mais je pense que dans l’ensemble, le niveau de compétition va beaucoup augmenter. Non seulement ça va attirer davantage l’attention sur le hockey féminin dans l’ensemble en raison de la tenue des Jeux olympiques, mais la LPHF va aussi faire en sorte qu’il y aura plus d’intérêt pour le tournoi olympique. Je pense à l’auditoire qui suit la diffusion des matchs [de la LPHF] et à quel point il y a des fans engagés dans tous les pays, ce qui est vraiment important. Par exemple, Tereza Vanišová [qui est originaire de la Tchéquie et qui évolue avec la Charge d’Ottawa] est une buteuse de premier plan dans la LPHF. Les fans d’Amérique du Nord vont regarder les matchs et vont suivre ce qu’elle fait.

Les joueuses de hockey canadiennes célèbrent leur médaille d'or sur la glace.
Équipe Canada célèbre sa médaille d’or en hockey féminin aux Jeux olympiques d’hiver de Beijing 2022, le 17 février 2022. Photo by Mark Blinch/COC

Peux-tu parler un peu de la trajectoire de ta carrière, et ensuite, de quelle façon le contexte est-il différent pour les jeunes filles qui peuvent maintenant rêver de jouer au hockey dans les rangs professionnels?

Dans mon cas, jamais je n’aurais cru que ça pouvait devenir une possibilité. Chaque jour est un défi, je dois vraiment travailler fort pour améliorer mon niveau de jeu, et je trouve que c’est là quelque chose de vraiment spécial.

Quand tu as l’occasion de jouer tout le temps et d’avoir l’encadrement d’entraîneurs tous les jours, c’est vraiment spécial de pouvoir découvrir quelles sont les lacunes dans ton jeu et d’avoir l’occasion de les corriger, d’apprendre des autres joueuses sur une base quotidienne et tu peux voir différentes joueuses briller. Cela a vraiment changé la trajectoire de ma carrière.

En ce qui concerne les jeunes filles, je pense que l’élément le plus important, c’est que la LPHF est une façon d’inciter les filles d’un peu partout dans le monde à continuer à pratiquer un sport. Le fait qu’on puisse voir les matchs à la télé, que des filles veuillent faire comme Natalie Spooner, ou faire comme Sarah Nurse, même si tu ne joues pas au hockey, même si tu ne fais pas de la compétition au plus haut niveau, ça motive les jeunes filles qui font du sport à continuer d’aller à l’aréna ou de se rendre au terrain pour discuter de ce qu’elles ont vu à la télé.

Ç’a tellement de valeur quand tu peux continuer à pratiquer un sport le plus longtemps possible, vraiment d’investir du temps et du travail là-dedans, et en tirer des leçons qui te seront utiles en tant que femme. Ça, c’est la plus belle retombée qu’il y a avec cette ligue.

Comment tu te sens en sachant que tu fais partie des premières joueuses à ouvrir la voie pour les autres?

Je sens que j’ai une responsabilité, parce que j’ai eu la chance d’être là au bon moment. Beaucoup de femmes ont travaillé fort avant moi pour rendre cette ligue possible, et moi, j’ai juste eu un peu plus de chance. Je suis vraiment reconnaissante d’en faire partie. C’est un vrai défi, mais juste d’avoir l’occasion de vivre ça, c’est un immense privilège.

Je réalise aussi à quel point certains de nos gestes ont de la portée, ça m’a vraiment ouvert les yeux. Je dirige un camp tous les étés avec Renata [Fast] à Burlington, et la différence entre l’année avant la LPHF et l’année suivante la première saison de la LPHF dans l’attitude des filles,  c’est fou à quel point c’était énorme. Leur niveau d’engagement, et aussi le fait qu’elles veulent un autographe elles aussi, pas juste les parents. L’ambiance est différente. C’est vraiment bien de voir les étincelles qu’elles ont dans les yeux quand elles te regardent. Nous sentons que les obligations que nous avons à leur endroit ont changé de nature.

Aussi, c’est sensationnel de voir des femmes d’un certain âge, qui n’ont jamais pu profiter de ce genre de possibilité. Ç’a été super touchant de pouvoir discuter avec plusieurs femmes plus âgées qui se sont inscrites pour jouer au hockey à 55 ans, à 60 ans. Elles disent, ‘Oh, je voulais juste m’y essayer maintenant. Je vous vois faire’ ou encore, ‘J’ai joué au hockey plus jeune et j’ai arrêté parce qu’il n’y avait pas vraiment de raison de continuer’. Je trouve que c’est quasiment aussi touchant que ce qu’on voit chez les jeunes filles.

Quel est ton plus beau souvenir depuis le début de ta carrière?

Je dois dire que c’est difficile de rivaliser avec la médaille d’or olympique! Cette année-là dans son ensemble, à quel point tout s’est déroulé si rapidement, de pouvoir fréquenter les modèles qui m’inspirent tous les jours, accumuler tout ce bagage d’expérience, c’est difficile de rivaliser avec ça. Ça me motive aussi jour après jour à tout faire tout ce qu’il est possible de faire pour m’assurer que je sois retenue au sein de la prochaine [équipe olympique].

Cette année-là a été une étape tellement importante dans ma carrière. Cela a transformé ma vie. Alors c’est difficile de mentionner un autre souvenir que celui-là.

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Quel serait ton plus beau souvenir en tant que fan de ton sport?

Quand j’ai remporté la médaille d’or olympique, il a fallu que je prenne congé de mes études à Ohio State pendant un an. Mes coéquipières m’ont soutenue dans ma décision, les entraîneurs aussi. Ils ont fini par remporter le championnat national cette année-là, pour la première fois dans l’histoire du programme, et j’y suis retournée pour assister aux matchs de demi-finale et de la finale.

Il y avait tellement d’émotions, j’étais tellement fière de faire partie de cette organisation-là et de voir tout ce chemin que l’organisation avait parcouru. Alors les regarder gagner, regarder plusieurs de mes meilleures amies le faire, elles qui sont pratiquement des membres de ma famille, c’était sans aucun doute mon plus beau moment comme partisane.

Une joueuse canadienne devant le but suédois.
La gardienne de but suédoise Emma Soderberg (30) effectue un arrêt contre la Canadienne Emma Maltais (27) lors de la première période du quart de finale du Championnat du monde féminin de hockey de l’IIHF à Utica, New York, le jeudi 11 avril 2024. LA PRESSE CANADIENNE/Christinne Muschi

En rafale avec Emma Maltais

As-tu un rituel ou une routine d’avant-match?

J’aime avoir du plaisir! J’ai ma routine de base où je mange à une heure particulière, où je mange certains aliments en particulier, mais dans LPHF je suis branchée, alors c’est moi qui prépare la liste de chansons. Avec l’équipe nationale et avec les Sceptres, j’adore m’éclater un peu. Nous sommes toujours en train de danser. Nous sommes toujours en train de rire, de bavarder avant le match. Le but, c’est de s’amuser et de se détendre.

Qu’est-ce qu’on trouve sur ta liste de chansons?

Je dois faire preuve de polyvalence. Nous avons des joueuses d’âges différents, alors ça varie beaucoup. Dernièrement, il y a eu pas mal de rap de filles et de musique d’autres époques.

Un(e) athlète que tu admires?

Eh bien, ma réponse à cette question a toujours été [Marie-Philip] Poulin. Je ne sais pas s’il va falloir que j’arrête de le faire bientôt, parce qu’elle est une de mes meilleures amies maintenant, mais je trouve qu’elle est vraiment un exemple à suivre. Même maintenant, elle continue de progresser dans son jeu, c’est impressionnant. C’est vraiment inspirant de voir quelqu’un d’aussi talentueux avoir de telles habitudes de travail et d’être aussi humble.

Si tu ne jouais pas au hockey, quel sport pratiquerais-tu à la place?

La gymnastique, probablement. Plus jeune, il y a deux voies qui s’offraient à moi et j’ai fini par choisir le hockey. Les gens disent toujours que j’ai le corps (petit et puissant) qu’il faut pour faire de la gymnastique.

Le meilleur conseil qu’un(e) entraîneur ou une coéquipière t’ait jamais donné?

Savoir savourer le moment quand les choses deviennent vraiment difficiles. En tant qu’athlètes, nous avons tendance à en arriver à un point où nous croyons mériter d’obtenir un certain résultat, ou bien où nous pensons que les choses vont devenir plus faciles. Je pense que le meilleur conseil qu’on m’ait donné, c’est : de toute façon, pourquoi voudrais-tu que ce soit facile?