Gilles et Poirier visent à briller au tango avant de commencer à penser aux Jeux olympiques d’hiver de 2026
Piper Gilles et Paul Poirier sont calmes et sereins à l’approche de leur cinquième Finale du Grand Prix ISU – et quatrième de suite – en carrière.
Cependant, si vous croyez qu’à ce stade de leur carrière, ils tiennent pour acquis le fait qu’ils font partie des six meilleures équipes de danse sur glace au monde, eh bien, détrompez-vous.
« Chaque année, nous planifions notre horaire comme si nous allons y être, mais ça reste quand même une belle réalisation, alors nous en sommes particulièrement fiers, a indiqué Poirier dans une récente entrevue. Même s’il est vrai que le Grand Prix en Finlande ne s’est pas passé tout à fait aussi bien que nous l’aurions voulu, nous sommes quand même contents du début de saison que nous avons eu jusqu’ici. »
Il est vrai qu’ils ont bien lancé leur campagne avec un cinquième titre de suite aux Internationaux Patinage Canada, et les points qu’ils ont obtenus leur ont permis d’atteindre au troisième rang du classement cumulatif de la saison. Les médaillés d’argent en titre des Championnats du monde ont toutefois livré une rare contre-performance au Trophée Finlandia, où Poirier a perdu pied à la fin d’une séquence de voltes dans leur programme libre. Résultat, ils ne sont pas montés sur la première marche du podium dans le cadre d’un Grand Prix pour la première fois depuis l’automne 2021.
Ils n’ont pas paniqué à la suite de cet accident de parcours due à la malchance, toutefois, parce que c’était justement de la simple malchance. Ils ont passé les deux semaines avant la compétition suivante à travailler sur de petits changements qui, espèrent-ils, amélioreront leurs chances d’aller chercher des pointages plus élevés au moment où ils affronteront leurs principaux rivaux à l’échelle internationale pour la première fois cette saison.
Gilles et Poirier n’ont pas été la seule équipe de danse sur glace de premier plan à chuter cet automne. Loin de là, en fait. Les deux équipes qui les ont accompagnés sur le podium aux Championnats du monde – les Américains Madison Chock et Evan Bates ainsi que les Italiens Charlene Guignard et Marco Fabbri – ont à tour de rôle pris la deuxième place dans l’un de leurs Grands Prix. Ce qui a eu pour effet de rendre la danse sur glace plus imprévisible qu’au cours des saisons précédentes.
Gilles estime que cela fera de la Finale du Grand Prix une compétition amusante et intéressante, autant pour les partisans que les patineurs et patineuses.
« Notre niveau de confiance est encore bon. Nous savons que nous avons tout simplement eu quelques pépins et les autres aussi, a-t-elle souligné. Les trois équipes les mieux classées au monde ont vécu le même genre de petits pépins et ça montre que nous sommes tous humains, nous ne sommes pas des robots. Ce sont des choses qui arrivent et je trouve que c’est palpitant de voir cette nouvelle génération défier des athlètes comme nous et nous forcer à donner notre meilleur niveau. »
Au sein de cette nouvelle génération qui amène la vieille garde à donner son maximum, il y a les Canadiens Marjorie Lajoie et Zachary Lagha, qui se sont qualifiés pour la Finale du Grand Prix pour la deuxième année d’affilée. Toutefois, le fait d’affronter des adversaires coriaces du même pays n’est rien de nouveau pour Gilles et Poirier eux qui, au début de leur carrière ensemble, avaient dû patiner contre des équipes comme celles composées de Tessa Virtue et Scott Moir ainsi que de Kaitlyn Weaver et Andrew Poje.
« Le Canada a un contingent si solide en danse sur glace que ça nous force à être à notre meilleur en tout temps, autant que possible. Je trouve que c’est vraiment motivant et c’est formidable de faire partie d’une équipe solide, surtout à l’approche des Jeux olympiques, alors que nous avons le sentiment de travailler ensemble et d’aspirer à la même chose », a déclaré Poirier.
Le fait d’avoir deux équipes parmi les six meilleures donne au Canada d’excellentes chances de qualifier le maximum de trois places en danse sur glace aux prochains Jeux olympiques. La majorité des places de quota en patinage artistique qui seront disponibles en vue des Jeux de Milano Cortina 2026 seront attribuées en fonction des résultats obtenus aux Championnats du monde de l’ISU au mois de mars 2025. Si les places obtenues par les deux meilleures équipes de danse sur glace du Canada donnent un total de 13 ou moins, cela procurera trois places olympiques au pays. Les mois entre la Finale du Grand Prix et cette édition extraordinairement importante des Championnats du monde ne seront pas passés à ne rien faire.
À la mi-janvier, Gilles et Poirier chercheront à décrocher leur quatrième titre national avant de viser l’or aux Championnats des quatre continents de l’ISU vers la fin du mois de février. Il restera alors moins de quatre semaines avant les Mondiaux, un délai plus court que les années précédentes, ce qui donne espoir aux deux Canadiens qu’ils pourront profiter d’une bonne erre d’aller jusqu’à la toute fin de la saison.
« Nous l’avons emporté dans le programme libre aux Mondiaux l’an dernier et c’est ce à quoi nous aspirons encore cette année, a affirmé Gilles. À l’approche des Jeux olympiques, nous voulons être parmi les aspirants à une médaille, alors il faudra vraiment établir notre place à l’occasion de ces compétitions-là. »
Depuis 2022, Gilles et Poirier ont consciemment choisi d’y aller une saison à la fois dans le cadre de leur approche, ne voulant pas s’enfermer dans un carcan en vue des campagnes suivantes.
Le duo sait aussi que Milano Cortina 2026 représente l’aboutissement de quelque chose.
« Au moment d’entreprendre la saison, ça nous semblait difficile d’imaginer un monde où nous allions compléter la saison sans vouloir automatiquement disputer la saison olympique ensuite, a noté Poirier. Ce qui fait que nous traitons vraiment ces compétitions comme un tremplin vers tout ça. Évidemment, le fait demeure que nous nous concentrons avant tout sur la présente saison, sans regarder trop loin devant et en cherchant tout simplement à tirer tout le jus possible du moment présent en termes d’expérience et de croissance, tout en prenant d’abord et avant tout plaisir à performer. »
Puisqu’ils prévoient participer encore une fois à plusieurs tournées de patinage artistique après les Championnats du monde, leur saison morte sera plutôt courte à l’été 2025, si bien qu’ils ont commencé à réfléchir à quoi leurs programmes olympiques pourraient ressembler.
« Nous nous sentons à l’aise à cet égard parce que nous savons que nous sommes en mesure d’envisager plusieurs possibilités. Ce qui va être le plus difficile pour nous, je pense, c’est de choisir un programme que nous aurons le droit de présenter à la télé », explique Gilles, bien consciente du fait que les patineurs ont maintenant eux-mêmes la responsabilité de s’assurer qu’ils ont les droits pour utiliser la musique qu’ils choisissent.
Quand la musique classique faisant partie du domaine public était la norme, obtenir les droits musicaux ne représentait pas un souci. Cependant, des problèmes se sont posés en raison d’une tendance forte au sein du monde du patinage artistique d’utiliser une musique plus moderne et, en même temps, en raison du fait que de plus en plus de compétitions sont webdiffusées et qu’un nombre grandissant de programmes peuvent être visionnés en ligne pendant plusieurs années.
Gilles et Poirier vont donc prendre tout le temps dont ils ont besoin pour naviguer à travers ce nouveau genre de processus qu’est l’approbation du choix musical.
« Tu ne veux pas te retrouver à devoir te démener avec ça en juin, quand tu veux être déjà en train de commencer à chorégraphier ton programme », a souligné Poirier.
Ils ont entrepris la présente saison avec deux programmes solides qu’ils aiment toujours autant.
« Paul et moi, nous sommes les plus épanouis quand nous avons de l’enthousiasme pour quelque chose et que notre créativité est bien nourrie, a dit Gilles. À l’entraînement, nous savons que nous pouvons livrer ces programmes parce que nous y croyons à 100 %. »
Ils s’amusent beaucoup avec leur danse rythmée inspirée par Barbie et Ken au son de la musique des Beach Boys, tout en respectant l’exigence de représenter les danses sociales des années 1950, 1960 ou 1970. Preuve de leur créativité, ils ont demandé qu’on fabrique quatre costumes différents pour eux et ils ont éprouvé bien du plaisir à surprendre les gens avec le choix du costume qu’ils porteront dans une compétition donnée. Ils envisagent même de sonder leurs partisans pour savoir quel costume ils préféreraient les voir porter sur la glace.
Leur programme libre a une allure très différente. Adapté d’un programme qu’ils ont présenté le printemps dernier dans le cadre de la tournée Stars on Ice au son de la chanson « A Whiter Shade of Pale » reprise par Annie Lennox, il permet de véhiculer ce que certains qualifieraient de danse sur glace de la vieille école avec de nombreux mouvements de tango.
« Nous avons grandi à une époque où la danse sur glace était très différente, où pendant une bonne partie de nos carrières, il a fallu faire des danses obligatoires dans le cadre d’épreuves distinctes et les réussir à un très haut niveau, ce qui fait que nous aimons le caractère complexe qui vient avec tout ça », a expliqué Poirier.
« Ç’a été un exercice très intéressant et je pense que c’est quelque chose que nous avons vraiment aimé faire. Et je trouve que c’est un programme très différent, dans la façon dont il est construit, par rapport aux programmes libres que nous avons présentés ces dernières années. C’est bien pour nous. Nous aimons la variété et nous aimons les nouveaux défis, alors nous voulons toujours nous retrouver dans un espace où nous faisons quelque chose de nouveau ou que nous n’avons pas fait depuis un certain temps. »
S’il faut essayer quelque chose de nouveau et prendre quelques risques, alors la saison préolympique est le bon moment pour le faire.
La Finale du Grand Prix ISU aura lieu du 5 au 8 décembre à Grenoble, en France.