Les sauteuses à ski Abigail Strate et Alexandria Loutitt font décoller leurs rêves

Vous ne penseriez pas qu’il y ait beaucoup d’athlètes canadiens qui se feraient reconnaître dans les rues de Bled, en Slovénie, mais l’Olympienne d’Équipe Canada Alexandria Loutitt affirme que cela lui est déjà arrivé, grâce à l’enthousiasme de cette petite nation européenne pour le saut à ski.

Cet enthousiasme se traduit également par d’excellentes installations et une expertise en entraînement concentrées en Slovénie. C’est une des grandes raisons pour lesquelles des sauteuses canadiennes comme Loutitt et Abigail Strate, toutes deux originaires de Calgary, ont fait de ce pays leur maison loin de chez elles.

Strate raconte qu’après quatre ans passés à vivre et à s’entraîner en Slovénie, elle n’est toujours pas fluide en slovène, mais qu’elle est passée de ne connaître que des gros mots et des noms d’aliments à des salutations, les jours de la semaine, et autres expressions de base.

« Juste assez pour faire rire tout le monde autour de moi », a-t-elle dit en riant.

Les parcours de Strate et de Loutitt dans le saut à ski ont tous deux commencé bien plus près de chez elles. Pour Strate, c’était lors d’un camp sportif pour enfants à Calgary où elle a découvert ce sport pour la première fois, au site désormais fermé qui avait accueilli les épreuves de saut à ski des Jeux olympiques de 1988.

« On commence avec des skis alpins sur un très petit tremplin—on est dans les airs une seconde », a expliqué Strate.

Mais une seconde peut probablement paraître très longue à une fillette de six ans, l’âge qu’avait Strate à l’époque. Depuis, tout s’est déroulé—ou plutôt s’est envolé—comme une évidence.

Loutitt avait également six ans lorsqu’elle est tombée sous le charme du saut à ski. Tout a commencé en regardant les Jeux olympiques d’hiver de Vancouver 2010, et plus particulièrement les débuts du Canadien Mackenzie Boyd-Clowes en saut à ski.

« Il était vraiment jeune à l’époque, et ils parlaient beaucoup de lui à la télé », a raconté Loutitt. « J’étais complètement fascinée par ce sport. »

Puis, comme le destin l’a voulu, 12 ans plus tard, Loutitt et Strate se retrouvaient toutes deux sur le podium olympique aux côtés de Boyd-Clowes et de leur coéquipier Matthew Soukup après avoir remporté le bronze à l’épreuve inaugurale de saut à ski par équipes mixtes. Cet exploit marquait la toute première médaille olympique du Canada en saut à ski.

Abigail Strate, Matthew Soukup, Alexandria Loutitt et Mackenzie Boyd-Clowes célèbrent leur médaille de bronze à l’épreuve par équipes mixtes de saut à ski aux Jeux olympiques d’hiver de Beijing 2022, lundi 7 février 2022. Photo par Mark Blinch/COC

Depuis, Loutitt a accumulé encore plus de premières pour Équipe Canada. En janvier 2023, elle est devenue la première Canadienne à remporter une épreuve de la Coupe du monde de saut à ski de la FIS. En février 2023, elle est devenue la première championne du monde junior du Canada en saut à ski féminin. Quelques semaines plus tard, elle est devenue la première championne du monde canadienne en saut à ski, remportant l’épreuve du grand tremplin féminin à Planica, en Slovénie.

Avec autant de succès, Loutitt se fixe des standards extrêmement élevés, allant jusqu’à résister à l’envie de qualifier sa dernière saison de « sous-performance » alors qu’elle a terminé troisième au classement général de la Coupe du monde—une autre première pour une Canadienne. La jeune femme de 20 ans affirme qu’elle commence à réaliser qu’être aussi dure envers elle-même n’est pas constructif.

« Cette année, je me permets d’être un peu plus vulnérable, de ne pas être déçue lorsque je fais de petites erreurs, car il est plus difficile de se relever lorsqu’on se blâme soi-même. »

Loutitt travaille à relâcher cette pression en percevant le fait de voler dans les airs comme une partie totalement normale de sa journée, aussi incroyable que cela puisse paraître pour beaucoup d’entre nous.

Alexandria Loutitt, sauteuse à ski d’Équipe Canada, participe à l’épreuve par équipes mixtes aux Jeux olympiques d’hiver de Beijing 2022, lundi 7 février 2022. Photo par Mark Blinch/COC

« J’ai une expression avec mon entraîneur, qui est un peu une blague, mais on dit : « On promène juste le chien ! ». Vous savez, c’est une manière de rester détendue. C’est comme si vous aviez la même attitude que lorsque vous sortez le chien », a expliqué Loutitt.

Strate est d’accord pour dire qu’un facteur clé du succès en saut à ski est l’aspect mental.

« On dit souvent que le saut, c’est 80 % mental et 20 % physique », a-t-elle déclaré. « Il n’y a pas grand-chose que nous puissions faire physiquement, à part être en forme en général, être légères et avoir des jambes fortes. Mais surtout, il faut être capable d’utiliser sa tête quand on est là-haut. »

La saison dernière, Strate a clairement expérimenté ce que c’est que d’atteindre cet état de fluidité, en décrochant trois podiums consécutifs en Coupe du monde de la FIS, à Garmisch-Partenkirchen, Oberstdorf et Villach.

« J’étais dans la zone. C’était la chose la plus cool de ma vie », a déclaré Strate. « Je ne veux rien de plus que retrouver cette sensation au début de la saison et tout au long de celle-ci.

« Je suis tellement heureuse d’avoir eu cette petite série, car cela me motive à vouloir revivre cela dans les prochaines années, surtout avec les Jeux olympiques qui approchent. »

Abigail Strate, du Canada, célèbre sa troisième place au tremplin normal féminin lors de l’épreuve de Coupe du monde de saut à ski à Villach, en Autriche, mercredi 3 janvier 2024. (AP Photo/Darko Bandic)

Loutitt et Strate entament toutes deux cette saison avec de grands espoirs. Pour Loutitt, c’est la première saison où elle commence en étant en bonne santé, sans rééducation à faire, ce qui lui a permis de faire de grands progrès à l’entraînement. Elle est surtout impatiente de montrer le travail qu’elle a accompli dans une soufflerie cet été, un équipement spécialisé qui permet de s’entraîner à la phase de vol d’un saut.

Le vol a également été un axe d’entraînement pour Strate. Les atterrissages ont été un point d’attention pour toute l’équipe, car c’est dans ce domaine que les Canadiens perdent souvent des points dans les évaluations.

C’est l’une des choses que Loutitt explique le plus souvent à propos de son sport—qu’il ne s’agit pas seulement de sauter loin. Oui, la distance compte, mais il y a aussi cinq juges qui évaluent chaque saut pour le style et attribuent des points sur une échelle de 0 à 20, en prenant en compte des éléments comme la position du corps en l’air et à l’atterrissage. Les conditions extérieures, comme les vents de face ou les vents arrière, peuvent également influencer les résultats.

Loutitt doit aussi sourire quand on lui demande combien de flips elle peut faire (confondant le saut à ski avec les sauts acrobatiques).

« Littéralement, aucun. »

Équipe Canada sera en action pour la première étape du circuit de la Coupe du monde de saut à ski de la FIS à Lillehammer, en Norvège, du 21 au 23 novembre. Consultez l’aperçu des sports nordiques d’Équipe Canada pour plus d’événements et d’athlètes à surveiller.