Parcours d’un skieur de fond : Ivan Babikov

Le 4 janvier, Ivan Babikov est devenu le deuxième skieur de fond canadien de sexe masculin à gagner une médaille d’or en Coupe du monde. Babikov a remporté l’épreuve du 11 km poursuite en Italie, sur l’une des pistes les plus difficiles au monde où les 425 derniers mètres constituent une lente montée vers la ligne d’arrivée. C’était sa première saison dans l’équipe.

« Pour moi, ce fut une grande surprise », a-t-il déclaré.  « Sur le podium, j’étais transporté, c’est la meilleure sensation au monde. »

Son parcours jusqu’à ce moment-là – et probablement jusqu’aux Jeux olympiques d’hiver de 2010 – aura été atypique, mais le skieur de 28 ans ne s’est jamais détourné de son objectif.

Il est né à Syktyvkar, une ville russe de 280 000 habitants, plus proche de la mer de Barents que de Moscou. Syktyvkar a, d’après Babikov une longue histoire de ski de compétition. « L’hiver est tellement long, et nous recevons tellement de neige, que le ski, c’est pratiquement tout ce que nous avons à faire », déclare-t-il.

À l’âge de neuf ans, il s’est inscrit dans une école locale de ski de fond, plus pour être avec ses amis avec qui il pratiquait le soccer.  Le ski s’est révélé le sport parfait pour lui permettre de dépenser toute l’énergie qu’il avait étant enfant.  Il a rapidement été séduit par ce sport et son côté compétitif, pour ne pas dire que ça lui est venu naturellement.

« Lorsque je concourais au niveau junior, je n’étais pas très bon », affirme-t-il.  « Mes amis étaient beaucoup plus rapides que moi.  Mais j’ai continué à travailler et à m’entraîner.  Je savais que je devais m’entraîner encore plus fort si je voulais battre ces gars. »

Il se trouve que Babikov avait la volonté à toute épreuve nécessaire pour être un bon fondeur. Il s’est régulièrement amélioré pour devenir l’un des meilleurs skieurs de la Russie.  Il n’a pas réfléchi à la route que prendrait sa carrière; il voulait seulement s’améliorer.  « Je suis très têtu, et je ne quittais pas les pistes tant que je ne sentais pas que j’avais fait quelque chose de manière adéquate. »

Babikov a immigré au Canada en 2003 et a commencé à travailler à Toronto dans le but d’obtenir sa citoyenneté et de parrainer sa femme et son fils. Il avait laissé Svetlana et Sergey en Russie, et ils y resteraient pour les trois prochaines années. Babikov a cru qu’il devait abandonner le ski. Toutefois, une équipe, en l’occurrence X-C.com, l’a appelé de Canmore, en Alberta pour l’inviter à se joindre à ses membres.  Il a hésité avant d’accepter et a connu une saison 2003-2004 qu’il qualifie « d’acceptable ». En réalité, il a dominé le circuit de la Coupe continentale.  Il s’est également rendu compte qu’il pouvait faire de l’argent grâce au ski.

Alors, sa carrière s’est poursuivie. Sa femme et son fils le rejoindraient à Canmore en 2006. Toutefois, en attendant, les choses n’étaient pas faciles pour lui. Tout en essayant inlassablement d’obtenir sa citoyenneté, il s’entraînait et concourait en Amérique du Nord et il se rendait en Russie chaque été pour voir Sergey grandir. Il se trouve que ces étés passés en Russie ont contribué à prolonger le processus d’obtention de la citoyenneté parce qu’il ne passait pas assez de temps au Canada.

N’étant pas encore citoyen canadien, il n’a pu porter les couleurs de l’équipe nationale de ski de fond, et ce, même s’il était l’un des skieurs les plus solides du continent. Les derniers efforts pour obtenir ses papiers avant Turin 2006 ont été vains. Babikov a alors décidé d’essayer de se qualifier pour l’équipe russe pour les Jeux olympiques d’hiver de 2006, ce qu’il a réussi haut la main. Turin a été une grande source de stress pour lui, car les entraîneurs étaient méfiants à cause du temps qu’il a passé au Canada. Durant ces années, il a également skié à des compétitions de la Coupe du monde pour lesquelles il s’est qualifié en tant que Russe, et notamment durant la saison qui a suivi les Jeux de Turin au cours de laquelle sa famille est venue le rejoindre à  Canmore.  Plusieurs de ces épreuves se sont déroulées dans des villes au Canada, y compris, ironiquement, Canmore.

En janvier 2008, Babikov obtint sa citoyenneté canadienne, ce qui mit fin à une attente de cinq ans. Il pouvait finalement concourir pour le Canada à plein temps et y vivre avec sa famille.  Il a gagné sa première médaille en Coupe du monde la saison suivante, sa première médaille en tant que skieur canadien.

« Cela a augmenté grandement ma confiance, et c’est la même chose pour mes coéquipiers », ajoute-t-il.  « En me voyant (sur le podium) et savent qu’ils peuvent y arriver aussi ». Babikov affirme que les résultats de l’équipe se sont améliorés pendant le reste de la saison et aux Championnats du monde de 2009.  Pour lui, cela le conforte dans l’idée que le travail et l’entraînement mènent aux résultats.

Babikov est excité à l’idée de concourir en février prochain. « Rien ne peut se comparer au fait de concourir aux Jeux olympiques.  Tant de gens nous regardent.  Nos amis et notre famille sont là. La compétition est forte.  Il n’y a rien de mieux. »

Il reconnaît la pression qui découle du fait de concourir à domicile, mais pour lui, la pression vient davantage de l’intérieur, particulièrement dans un sport qui est très individuel de nature et où on concourt principalement contre soi-même.  « Quelque part, dans notre tête, on sait que c’est une chance de le faire chez  soi, dans son pays. »

Babikov dédramatise le fait qu’il aura à concourir contre d’anciens coéquipiers russes à Whistler. Ils sont toujours ses amis, et il a gardé contact avec eux.  « Nous n’allons pas devenir des ennemis maintenant », plaisante-t-il.