Berger est enchanté de voir la culture olympique accueillir celle du skateboard
Pendant la majeure partie de la carrière de Matt Berger, devenir un athlète olympique ne faisait pas partie des scénarios envisageables.
Ce qu’il cherchait à réaliser, comme pas mal tous les autres planchistes dans le monde, était d’afficher son talent dans des vidéos et des films, de faire l’objet d’articles dans des magazines et de participer à des compétitions comme les X Games et le circuit de la Street League.
Et maintenant qu’il fera partie de la grande Équipe Canada sur la plus importante scène sportive au monde ?
« Je ne pourrais pas demander mieux comme situation, en fait », dit-il d’entrée de jeu.
À LIRE : Trois hommes composeront la toute première équipe olympique canadienne de skateboard de l’histoire
Aussi fou que cela puisse paraître, Berger affirme qu’il sait depuis l’âge de huit ans qu’il pourrait faire carrière dans son activité favorite et en vivre. C’était sa passion, une passion nourrie par ses parents. Quand son père Michael a vu à quel point son fils adorait le skateboard, il a construit des rampes sur le patio de ciment dans la cour de la maison familiale.
« J’y ai passé des milliers d’heures. C’était mon petit parc personnel et c’est là que j’ai commencé à rêver de faire du skateboard chez les professionnels, raconte Berger, qui a ajouté qu’il était le seul jeune dans son quartier à faire du skateboard, ce qui veut dire qu’il a dû passer beaucoup de temps à s’entraîner seul.
Il était encore en 10e année quand il a commencé à recevoir des chèques de paie pour de modestes sommes. Après quelques performances qui lui ont permis de se faire connaître en 2014, il est devenu le premier amateur à se qualifier au sein du circuit de la Street League. Il a rejoint les rangs professionnels en 2015.
Malgré tous ses succès, lui qui a notamment participé plusieurs fois aux X Games et donc performé devant des foules de plusieurs millions de spectateurs, Berger déclare qu’il ne s’est pas toujours senti accepté par ceux et celles qui connaissent peu le monde du skateboard. C’est là quelque chose que l’entrée au programme olympique a déjà permis de changer.
« Le plus drôle en ce qui me concerne, c’est qu’après des années et des années à dire aux gens que ma profession c’est le skateboard, ils me regardent encore comme si j’étais un drôle de moineau, a raconté Berger en décembre 2019. Depuis qu’il figure au sein d’Équipe Canada, cela a éclairci les choses pour les nombreuses personnes qui n’avaient pas compris qu’il existait une communauté du skateboard et que c’est un parcours que les gens peuvent choisir de suivre. »
Dans un monde qui n’a jamais semblé plus morcelé, Berger considère qu’il y a une place pour tout le monde dans le milieu du skateboard, même s’ils n’en ont jamais fait partie auparavant.
« La mentalité du skate, on la retrouve dans toutes les couches de la société. Ça relie les différentes classes sociales. Ça tisse des liens entre toutes les races. »
À ceux et celles qui se considèrent comme étrangers à cet univers et qui suivront une épreuve de skateboard pour la première fois à Tokyo 2020, Berger dit que « vous allez graviter naturellement vers le style que vous aimerez le plus. À ce titre, personne n’a raison, personne n’a tort. C’est ce qui fait que le skateboard se démarque, selon moi. Cependant, si vous cherchez à savoir qui sont les meilleurs planchistes, il faut penser en fonction de ceux qui font preuve de la plus grande constance sur la planche, ceux qui semblent le plus à l’aise et ceux qui restent eux-mêmes sur le parcours. Évidemment, il y a aussi ceux qui font les figures les plus difficiles. »
Inventer et peaufiner ces figures difficiles vient du simple désir de faire quelque chose de nouveau. Au fur et à mesure qu’un planchiste bâtit son répertoire de figures, il peut aussi pousser davantage la note sur le plan de la créativité, ce qui est un élément qui permet au skateboard de se distinguer des autres sports, selon Berger.
« Bien souvent, les gens débattent à savoir si c’est un sport ou si c’est un art… Il y a un fort élément d’expression personnelle, souligne Berger. Pour moi, c’est plutôt une question d’y aller et de rouler avec mes amis, de repousser les limites et sortir de ma zone de confort quand je suis sur la planche. Si je fais ça régulièrement, ça va du même coup m’aider à rehausser mon niveau de skate et à me préparer pour ces grandes compétitions. »
Mis à part le fait que la communauté du skateboard qu’il aime tant va gagner des millions de nouveaux adeptes à travers le monde, Berger espère que l’intégration au programme olympique aura un effet positif sur la prochaine génération de planchistes, au Canada surtout. Il y a encore énormément de place à ce que les conseils municipaux et les organismes communautaires investissent encore plus dans les infrastructures de skateboard, selon lui.
Berger souligne que pour bien des jeunes avec qui il a grandi, le skateboard les a empêchés « de suivre la mauvaise voie ». Il note par ailleurs que le climat au Canada ne facilite pas la tâche de ceux et celles qui voudraient exprimer leur art sur les rampes à longueur d’année.
« Pendant ma jeunesse à Kamloops, il y avait une période de six mois dans l’année où je ne pouvais pas faire ce que j’adorais. Quand j’y repense, je me demande à quel point j’aurais pu aller plus loin encore dans ma carrière si j’avais pu en faire toute l’année, si la ville avait bâti des installations intérieures, comme pour le hockey et le soccer », soulève Berger.
« J’espère que tout ceci permettra aux gens de réaliser à quel point la communauté est dynamique et à quel point ce sport a une incidence positive sur la vie des gens. Dans mon cas, le skateboard m’a tout donné. »