Christine Girard lève les bras dans les airs, les anneaux olympiques à l'arrière plan.Photo: AP/Hassan Ammar
Photo: AP/Hassan Ammar

Du bronze à l’or olympique, une panoplie d’émotions pour Christine Girard

« Il est vraiment facile de se perdre dans les “et si…”, mais je n’ai jamais été ce genre de fille, alors j’essaie de ne pas trop y penser. »

Dans une autre réalité, Christine Girard était la première médaillée du Canada à Beijing 2008. Au lieu d’une première semaine sans médaille à ces Jeux, les Canadiens auraient célébré une médaille de bronze au jour 4.

Une seconde médaille, l’or quatre ans plus tard à Londres 2012, aurait fait d’elle une héroïne nationale en devenant l’une des deux championnes olympiques du Canada couronnées aux Jeux et l’haltérophile la plus décorée de l’histoire du pays.

Christine Girard du Canada lors de la compétition des moins de 63 kg aux Jeux olympiques de Londres, le 31 juillet 2012. (AP Photo/Mike Groll)

Mais ce n’est pas sa réalité.

Elle a plutôt vécu une panoplie d’émotions au cours des dernières années – la fébrilité et la frustration, le bonheur et l’amertume — en apprenant qu’elle aurait pu goûter, deux fois plutôt qu’une, à la gloire d’être une médaillée olympique.

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C’est suite à la disqualification rétroactive de trois athlètes après de plus amples tests d’antidopage sur des échantillons stockés des Jeux de Beijing et de Londres que Girard a finalement obtenu les résultats qu’elle a mérité, soit une troisième place en 2008 et une première place en 2012, plus d’un an après la dernière disqualification.

Christine Girard lors de compétition des moins de 63 kg aux Jeux olympiques de Londres, le 31 juillet 2012. (AP Photo/Hassan Ammar)

« Je suis ravi de recevoir ces médailles, a déclaré Christine à Olympique.ca suite à la disqualification finale qui se tenait entre elle et l’or olympique. Je suis vraiment content et je pense que c’est un chamboulement positif pour mon sport. C’est génial pour moi, évidemment. C’est génial pour le Canada, mais, en même temps, il y a toujours un goût amer dans le fait que ma vie aurait changé du tout au tout si j’avais eu la médaille d’or autour du coup en 2012. »

« Quand je suis revenu de Beijing, les gens me le disaient, parce que j’étais quatrième “ tu y étais presque. N’abandonne pas, tu seras bonne un jour ”. C’était vraiment difficile pour moi. Aujourd’hui, cette quatrième place s’est transformée en troisième, et me voilà championne olympique de 2012. J’ai l’impression de mieux comprendre ce que les athlètes traversent. Je connais maintenant la différence entre avoir une médaille et ne pas avoir de médaille, et ce que cela signifie pour le monde. »

Christine Girard partage le podium de Londres 2012 avec Maiya Maneza du Kazakhstan, au centre, et Svetlana Tsarukaeva de la Russie, à gauche, toutes deux disqualifiées en raison d’infractions pour cause de dopage. (AP Photo/Mike Groll)

Lors de la dernière année, les sentiments plus négatifs de son parcours se sont tranquillement dissipés. Girard a commencé à voir son expérience d’un autre angle. Elle a participé à une conférence organisée par l’Institut des organismes nationaux antidopage où elle s’est entourée de gens qui consacrent leurs vies à combattre le dopage, lui offrant ainsi une nouvelle perspective sur sa situation.

« Je suis assez fière de l’athlète que j’étais, probablement encore plus aujourd’hui puisque je porte un regard différent sur ma carrière », a indiqué Girard après avoir appris que la médaille d’or lui était officiellement octroyée.

Christine Girard a canalisé ses émotions dans l’écriture d’un livre sur sa vie entre ses deux présences olympiques. Entamé l’automne dernier quand elle a pu trouver du temps entre s’occuper de ses deux enfants — Philip, maintenant âgé de 2 ans et demi, et Alianna, qui aura bientôt 1 an — et entrainer plus d’une douzaine d’haltérophiles au club qu’elle a fondé. Le manuscrit a récemment été envoyé à son éditeur.

Elle essaie maintenant de comprendre ce que recevoir ses médailles cinq et neuf ans après le fait signifie pour elle. Une cérémonie spéciale sera organisée là où elle le souhaitera comme ce fut le cas pour la fondeuse Beckie Scott qui a également vu sa médaille de bronze se transformer en or en raison d’infractions de dopage. Les deux athlètes ont d’ailleurs eu la chance d’échanger des courriels pour parler de leurs expériences personnelles.

« Elle a dit qu’elle n’avait pas seulement l’impression de recevoir la médaille pour elle-même, mais que c’était plus grand et plus significatif pour tous et je pense que c’est aussi ce que je veux faire, a mentionné Christine. C’est la fierté d’un pays et une belle représentation de nos valeurs. Nous, les Canadiens, pouvons gagner équitablement en étant fidèles à nous-mêmes et je pense que c’est là que je vais tirer ma joie. »

Christine Girard lors de compétition des moins de 63 kg aux Jeux olympiques de Londres, le 31 juillet 2012. (AP Photo/Hassan Ammar)

Christine Girard lors de compétition des moins de 63 kg aux Jeux olympiques de Londres, le 31 juillet 2012. (AP Photo/Hassan Ammar)

Girard reconnaît que son sport a toujours été confronté à un problème de dopage, mais elle souhaite que ce qui lui est arrivé serve d’exemple aux haltérophiles de demain, en particulier les jeunes filles.

« Il n’y a pas si longtemps, même au Canada, les gens pensaient qu’il était impossible pour une fille de soulever cent kilos sans prendre de drogues. Eh bien, je l’ai montré. Mon échantillon a été testé, je suis certaine à plusieurs reprises. Et il a toujours été propre. »

« J’ai rencontré des haltérophiles découragés parce que d’autres pays ont pris de la drogue et ils ont toujours eu l’impression qu’ils étaient derrière en raison de cela, a-t-elle poursuivi. Il m’a fallu 18 ans pour monter sur le podium aux Jeux olympiques, mais ça valait la peine de montrer aux gens que c’était possible, alors j’espère vraiment que c’est le message qui sera associé à mon nom, que si nous travaillons vraiment fort et nous persévérons, tout est possible. »