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Ski-alpinisme 101 : ce que vous devez savoir sur le nouveau sport olympique d’hiver

Un nouveau sport est au programme des Jeux olympiques d’hiver : le ski-alpinisme fera ses débuts olympiques à Milano Cortina 2026.

Comme ce sport est probablement inconnu de nombreux partisans d’Équipe Canada, nous avons demandé l’aide de deux des meilleurs athlètes canadiens de ski-alpinisme, Kylee Toth et Matt Ruta, pour nous expliquer les tenants et aboutissants de ce sport téméraire.

Toth et Ruta se sont tous deux tournés vers le ski-alpinisme après avoir concouru à un haut niveau dans d’autres sports d’hiver : dans le cas de Toth, c’était le patinage de vitesse sur courte piste, et pour Ruta, le ski cross. Ils ont tous deux été attirés par le ski-alpinisme en raison de leur amour de la montagne et de leur esprit de compétition.

L’une des premières choses que nous avons apprises? Bien que le nom officiel soit le ski-alpinisme, les initiés préfèrent le terme succinct « skimo » (tiré de l’anglais ski mountaineering).

Qu’est-ce que le skimo?

La façon la plus simple de résumer le ski-alpinisme est peut-être de penser au ski de descente, mais de se dire ensuite : tout ce qui descend doit avoir d’abord remonté.

En ski-alpinisme, les athlètes dévalent une pente à skis, mais seulement après avoir d’abord remonté cette pente. Oubliez la randonnée en remontée mécanique… Nos courageux athlètes doivent exploiter pleinement leurs compétences en ski et en alpinisme pour se hisser jusqu’au sommet de la piste.

Les premiers Championnats du monde de ski-alpinisme ont eu lieu en 2002, mais la nécessité de se déplacer efficacement dans les régions montagneuses remonte à des siècles. En Europe, le sport a une histoire officielle plus longue, issue des patrouilles militaires dans les montagnes. Aujourd’hui, le ski-alpinisme peut être considéré comme une forme officielle et compétitive de ski hors piste, que Toth décrit comme un passe-temps.

« Le ski-alpinisme est un condensé de la randonnée hors piste et d’un amour profond pour le plein air, explique Ruta. Puis je pense que les Jeux olympiques ne sont qu’un condensé supplémentaire des courses que nous pratiquions déjà ».

Alors que le ski-alpinisme devient de plus en plus structuré en tant que sport, il est important pour la communauté qu’il conserve ce respect pour le plein air, qui va de la façon dont les athlètes se comportent sur le parcours, à la façon dont les parcours eux-mêmes sont balisés.

« Tout ce qu’ils font, c’est mettre des drapeaux sismiques que vous devez suivre, donc c’est vraiment un sport qui ne laisse aucune trace », souligne Toth.

Quelles seront les épreuves de ski-alpinisme à Milano Cortina 2026?

Il y aura deux types de courses de ski-alpinisme à Milano Cortina 2026 : des épreuves de sprint pour hommes et femmes, ainsi qu’un relais mixte par équipes. Les courses de sprint comportent en quelque sorte quatre sections, trois pendant la montée et une en descente, avec des zones de transition entre elles, comme dans un triathlon. Six athlètes sont en compétition dans chaque série préliminaire et ces séries durent généralement environ trois minutes.

« Vous laisserez donc vos peaux [attachées sous les skis pour l’adhérence] et vous monterez avec vos skis aux pieds jusqu’à un point situé à environ un tiers du parcours, puis vous enlèverez vos skis et les mettrez sur votre dos et vous monterez ce qu’on appelle un corridor de randonnée, explique Ruta. Ensuite, aux deux tiers du parcours, vous enlèverez vos skis de votre sac à dos, les remettrez à vos pieds et continuerez à monter jusqu’au sommet, où vous retirerez les peaux et passerez en mode descente. Puis vous skiez à travers un parcours fixe pour revenir au départ ».

Les premiers athlètes qui franchissent la ligne d’arrivée gagnent ou passent au tour suivant. Cette version abrégée du sport a été créée dans l’optique de l’inclusion du skimo aux Jeux olympiques.

« La version originale de notre sport se déroule sur une distance plus proche du demi-marathon et sur plus de 1000 mètres de dénivelé. Elle se déroule sur un terrain montagneux qui nécessite un corridor de randonnée », explique Toth.

Ainsi, même si le terrain du format sprint ne nécessite pas techniquement de corridor de randonnée, on souhaitait conserver la démonstration de toutes les compétences d’alpinisme traditionnelles associées à une course de skimo.

« En tant que personne qui pratique ce sport depuis longtemps, les corridors de randonnée du sprint sont presque amusants pour moi, car ils découpent maintenant des marches de glace à la tronçonneuse, donc j’ai toujours l’impression – j’ai des enfants – d’être dans le film La reine des neiges », explique Toth.

Cependant, elle est reconnaissante que le format olympique ait préservé les compétences traditionnelles pour le sprint.

« Sinon, nous aurions juste monté sur des skis, retiré nos peaux et redescendu ».

Le relais mixte présente un groupe légèrement plus nombreux de 12 athlètes à la fois et est plus long que le sprint. Chaque athlète effectue des boucles du parcours, et passe le flambeau à son ou sa partenaire dans la zone de transition désignée.

Ruta et Toth ont connu du succès en tant que duo au relais mixte. L’équipe a décroché son premier résultat parmi les 10 meilleurs sur le circuit de la Coupe du monde ISMF en janvier 2024, en terminant neuvième à Boí Taüll, en Espagne.

Quel équipement est utilisé en skimo?

L’équipement de skimo est conçu pour être très léger, car moins vous transportez de poids supplémentaire en montée, plus vous irez vite. Cette légèreté des skis, bien qu’idéale pour la montée, a une incidence sur la partie descente de la course.

« Quand nous descendons à travers les portes, nous ne ressemblons pas à des skieurs alpins, car notre équipement ne pèse absolument rien. Les skieurs alpins ont un équipement lourd qui favorise la gravité, explique Toth. Nous skions sur un hybride, un peu comme un ski de fond. C’est extrêmement difficile d’utiliser le même ski pour une montée et une descente raide. »

Le ski en montée est aussi appelé « skinning » (qu’on pourrait traduire par montée avec peaux d’ascension), car les « peaux » sont attachées sous les skis pour assurer l’adhérence. Le nom de cet équipement vient du fait qu’à l’origine, on utilisait des peaux de phoque à cette fin. De nos jours, les peaux sont fabriquées à partir de matériaux synthétiques. Les athlètes de skimo portent des combinaisons en élasthanne dotées de poches spéciales pour ranger les peaux quand elles ne sont pas utilisées.

Ne vous inquiétez pas, les athlètes ne courent pas avec l’équivalent d’une botte de ski alpin, ce qui serait un cauchemar. Les chaussures de skimo ressemblent davantage à des chaussures de ski de fond de pas de patin et peuvent être verrouillées pour la descente.

De nombreuses règles du skimo sont liées à l’équipement et sont conçues en tenant compte des facteurs de sécurité de l’athlète et de l’environnement, avec des éléments de la version longue distance du sport. Toth s’y connaît, car elle fut la deuxième femme au monde à être officiellement désignée arbitre de skimo.

« En tant qu’arbitre, je peux affirmer que la sécurité est au cœur des règles. La plupart d’entre elles visent à garantir que vous et les coureurs autour de vous ne soyez pas heurtés par des bâtons et des peaux », explique-t-elle.

« Un bon exemple de cela est que vos peaux doivent être entièrement rentrées à l’intérieur de votre combinaison quand vous descendez. Cela vient des distances plus longues, où les athlètes ne peuvent pas laisser leurs peaux sur un parcours parce qu’elles deviendraient un déchet dans la nature », ajoute Ruta.

La transition de l’équipement (retirer et remettre les peaux et les skis) est soumise à des règles similaires à celles d’un triathlon.

« Tout comme vous ne pouvez pas quitter une zone de transition de triathlon tout en mettant vos chaussures, c’est la même chose en skimo, explique Ruta.  Dans les disciplines courtes, vous pouvez recevoir une pénalité de 30 secondes pour une transition en dehors de la zone appropriée. »

À quoi les nouveaux spectateurs doivent-ils s’attendre?

Comme il s’agit d’un format de course, le skimo ne devrait pas être trop difficile à comprendre pour les nouveaux spectateurs. Cela étant, Toth et Ruta ont suggéré quelques éléments à surveiller.

« Si c’est à la télévision, souvent, on ne réalise pas l’inclinaison de la pente ni en montée ni en descente, explique Toth. Je pense que si les gens pouvaient s’imaginer monter le plus vite possible une piste bleue/noire de la station de ski, c’est essentiellement ce qui se passe pour nous sur de très petits skis. »

« Pour moi, si je regarde un sprint ou un relais, je regarde attentivement les transitions. Cela vous donne parfois un peu plus d’informations sur la course quand vous pouvez voir qui a l’air vraiment fluide au moment des transitions, qui a l’air agité, qui a l’air fatigué, explique Ruta. « Et souvent, les attaques dans la course sont lancées dès la transition. »

Comment les athlètes canadiens de ski-alpinisme peuvent-ils se qualifier pour Milano Cortina 2026?

Le nombre de participants pour la première édition du ski-alpinisme aux Jeux olympiques sera très restreint, avec seulement 36 places disponibles (18 pour les hommes, 18 pour les femmes). Un comité national olympique peut qualifier un maximum de deux athlètes par sexe.

La période de qualification pour Milano Cortina 2026 s’étend du 1er novembre 2024 au 21 décembre 2025. Au cours de cette période, les athlètes concourront sur le circuit de la Coupe du monde ISMF pour accumuler des points, qui détermineront ensuite leur place dans les classements mondiaux.

« En tant que Canadiens, nous sommes impatients de concourir et de tout donner pour essayer de qualifier ces places pour le Canada, affirme Ruta. Du moins, de mon point de vue, c’est tout ce que je cherche : viser la meilleure performance possible à chaque course de la Coupe du monde la saison prochaine, puis voir ce que cela donnera finalement. »

La qualification olympique serait une grande réussite pour le tout jeune organisme national de sport de skimo du Canada, qui n’a été créé qu’en 2022.

« Bien que nous soyons un pays de sports d’hiver, ce sport est nouveau au Canada par rapport à d’autres sports, indique Toth. Je pense donc que nous nous en sortons bien malgré notre départ plus lent. Les pays les plus performants [en skimo] sont à peu près les mêmes qui dominent les [épreuves] nordiques. »

Quelle incidence les Jeux olympiques pourraient-ils susceptibles d’avoir sur le ski-alpinisme au Canada?

On espère que les débuts olympiques du ski-alpinisme permettront à ce sport d’être davantage connu à l’échelle mondiale.

En tant que parent, Toth considère que le format sprint est bénéfique en termes d’accessibilité au sport pour les jeunes athlètes et leurs parents, qui pourraient redouter certains éléments de sécurité des déplacements en terrain hors piste pour les jeunes.

« Je pense que l’avantage de la discipline du sprint est que nous pouvons désormais avoir un club dans une station de ski et faire profiter de cet équipement à des enfants de huit ans », dit-elle. « Cela rend ce sport accessible du point de vue du développement. »

Où puis-je en apprendre davantage sur le skimo?

Les personnes intéressées peuvent consulter la page de ski-alpinisme d’Olympique.ca, le site Web de l’Association canadienne de ski-alpinisme (SMCC) ou celui de l’organisme international de régie de ce sport, la Fédération internationale de ski-alpinisme.