Surf 101 avec Sanoa Dempfle-Olin
Le sport du surf a fait ses débuts au programme olympique à Tokyo 2020, mais étant donné qu’aucun Canadien n’a alors participé à la compétition, il y a sans doute encore de fans d’Équipe Canada qui aimeraient en savoir plus long sur les tenants et aboutissants du surf olympique.
Pour nous donner un cours accéléré de Surf 101, nous avons demandé l’aide d’une surfeuse canadienne qui sera de la partie à Paris 2024, Sanoa Dempfle-Olin, qui s’est qualifiée pour les prochains Jeux olympiques aux Jeux panaméricains de Santiago 2023 l’automne dernier.
L’athlète de 18 ans a ramené une médaille d’argent chez elle à Tofino, en Colombie-Britannique, une municipalité reconnue pour son amour du surf. Cette performance lui a valu son billet pour Paris, ainsi que l’occasion de faire connaître au reste du pays les attraits du surf.
Comment fonctionnent les compétitions internationales de surf?
« La chose de base à savoir, c’est que les surfeurs reçoivent des points pour leurs deux meilleures vagues. Ils sont notés sur une échelle de 1 à 10, un pointage de 10 étant le meilleur possible. Ensuite, j’imagine qu’un 0,1 serait le pire pointage que tu pourrais obtenir », lance Dempfle-Olin en riant.
« Nos deux meilleures vagues additionnées ensemble donnent notre pointage total pour la manche et le surfeur qui a le total le plus élevé remporte la manche. »
Le format habituellement adopté par l’International Surfing Association (ISA) consiste à disputer des manches à quatre personnes. Les deux meilleurs surfeurs de chaque manche passent à la phase principale, tandis que les deux autres surfeurs doivent passer par le repêchage. Dans la phase principale, les deux meilleurs surfeurs de chaque manche continuent. Dans le repêchage, les surfeurs qui finissent parmi les deux premiers passent à la prochaine phase du repêchage, tandis que les autres surfeurs sont éliminés de la compétition.
Le format de compétition pour les Jeux olympiques est toutefois différent.
La compétition commencera avec une première phase où 24 athlètes seront répartis en huit groupes de trois athlètes. Le vainqueur de chaque groupe passera directement à la troisième phase, tandis que les athlètes qui termineront deuxième et troisième se qualifieront pour la deuxième phase. Aucun surfeur ne sera éliminé à l’issue de la première phase de la compétition.
À compter de la deuxième phase, huit autres manches auront lieu, cette fois à raison de seulement deux surfeurs par manche. L’athlète perdant de chaque manche sera éliminé, tandis que le vainqueur se qualifiera pour la troisième phase. La troisième phase sera disputée selon le même format, avec le vainqueur de chaque manche qui passera aux quarts de finale, tandis que les surfeurs perdants seront éliminés.
Les quarts de finale consisteront en quatre manches de deux athlètes. Les vainqueurs se qualifieront pour les demi-finales et les surfeurs perdants seront éliminés. Les demi-finales consisteront en deux manches de deux athlètes. Les vainqueurs des demi-finales passeront à la manche pour la médaille d’or, tandis que les surfeurs perdants s’affronteront dans la manche pour la médaille de bronze.
Seulement un surfeur à la fois peut surfer sur une vague. Quand la manche commence, le surfeur qui se trouve le plus près de la crête de la vague a le droit de passage, et ensuite une rotation par priorité est établie. Les surfeurs peuvent écoper de pénalités s’ils gênent la capacité d’un concurrent à surfer sur une vague.
Les manches vont durer de 25 à 40 minutes, la durée exacte étant déterminée par les officiels techniques, en tenant compte des conditions de vague et de houle.
Quels éléments les juges de surf surveillent-ils?
Chers néophytes du surf, n’ayez crainte, Dempfle-Olin assure que les critères pour attribuer des points sont moins complexes qu’ils ne semblent l’être de prime abord. La meilleure façon pour se familiariser avec la façon de faire des juges, c’est de tout simplement regarder quelques manches pour voir quelles manoeuvres reçoivent le plus de points.
« Dans une compétition, les critères pour le surf sont la vitesse, la puissance et la fluidité, explique Dempfle-Olin. Et ensuite, les juges regardent quelles sont les manoeuvres que tu fais. Donc, si tu vois quelqu’un faire un virage et que ç’a pour effet de projeter des jets d’eau dans les airs, c’est un signe de vitesse et de puissance. Si sa planche change de direction, que ça va complètement à gauche et qu’ensuite ça va complètement à droite, ce changement très prononcé est déterminant.
« Si les ailerons d’un surfeur sont dégagés de l’eau, s’ils se retrouvent au-dessus de la vague, tout ça est pris en considération dans l’attribution des points. Pour une vague comme à Teahupo’o à Tahiti, les juges vont donner beaucoup de points à l’occasion des tubes, c’est-à-dire quand le surfeur ira à l’intérieur de la vague et la vague retombera au-dessus de lui. Dans ce contexte, le pointage est basé sur la grosseur de la vague et le temps que tu passes dans le tube, ou à quelle profondeur dans le tube tu te retrouves.
« C’est un peu déroutant quand on essaie de le décrire, mais quand tu vois tout ça se dérouler sous tes yeux, ça fait bien plus de sens! »
Les surfeurs qui prendront de plus gros risques seront récompensés. Un surfeur qui intégrera une variété de manoeuvres novatrices et d’avant-garde, en combinaison avec un niveau de risque élevé, recevra un pointage plus élevé que le surfeur qui aura présenté un grand nombre de manoeuvres qui se répètent et sont à faible risque.
Quel équipement utilise-t-on en surf olympique?
Aux Jeux olympiques, la compétition de surf inclut des épreuves féminine et masculine de shortboard. Habituellement d’une longueur de six à sept pieds (tout dépendant du surfeur), les shortboards sont plus petites et moins lourdes que les longboards (qui ont habituellement une longueur de neuf pieds environ), ce qui fait qu’elles offrent plus de flexibilité au chapitre de la maniabilité. Les shortboards ont trois ailerons et une forme pointue.
Outre sa planche, le surfeur peut avoir différentes pièces d’équipement selon la météo, le climat et ses préférences.
« J’ai l’habitude de surfer avec une combinaison, des bottes et des gants chez moi l’hiver, mais pour les gens qui n’y sont pas habitués, surfer dans une combinaison est une sensation vraiment bizarre », souligne Dempfle-Olin, qui a grandi en faisant du surf sur la côte ouest de l’île de Vancouver.
« Pour moi, surfer dans un climat tropical me semble parfois un peu bizarre. J’ai l’habitude d’avoir la combinaison sur le dos et j’ai quasiment l’impression de me sentir plus en sécurité quand c’est le cas. C’est plus une question d’habitude, mais je vais souvent à des endroits chauds pour le surf, alors maintenant ça ne fait pas beaucoup de différence si je porte une combinaison ou non. »
Qu’en est-il des conditions de surf imprévisibles?
La plupart du temps, les surfeurs doivent composer avec les conditions que Dame nature leur offre, peu importe lesquelles. Par contre, il y a toujours des plans de rechange qui sont prévus si la compétition doit être reportée en raison de conditions dangereuses.
« C’est l’aspect du surf qui est vraiment imprévisible et tu dois donc te préparer pour toutes les éventualités, affirme Dempfle-Olin. Évidemment, le vent a une influence sur les vagues, et ensuite la houle fait une grande différence, notamment en raison de la direction dans laquelle elle se déplace et de sa grosseur, ou encore selon l’endroit d’où vient la houle, si ça vient de loin ou si c’est localisé.
« Tu peux jeter un coup d’oeil aux prévisions et essayer de prédire un peu comment ça va se passer, mais dans le fond, il faut juste être prêt à affronter tous les scénarios. »
De quoi aura l’air la compétition de surf à Paris 2024?
Le surf aux Jeux olympiques de Paris 2024 se déroulera à l’autre bout du monde par rapport à la capitale française, soit à Teahupo’o à Tahiti. On prévoit disputer les épreuves au début des Jeux, soit les jours 1 à 4 du 27 au 30 juillet.
Même s’il s’agira d’un climat plus tropical que l’endroit que Dempfle-Olin fréquente chez elle, la Canadienne affirme que Teahupo’o lui procure certains avantages. « Je place mon pied droit en avant, ce qui veut dire que j’y vais de face à Teahupo’o parce que c’est à gauche. Donc, dans mon cas, ça met assurément une de mes forces en
valeur. »
Elle a eu la chance de se rendre à Tahiti pour se familiariser avec les conditions.
« Ça peut être gros et effrayant, mais ce sont aussi des vagues qui sont vraiment plaisantes. C’est clairement différent des vagues que nous avons à Tofino. Si vous demandez à un surfeur de décrire la vague rêvée, ils vont probablement parler d’un tube de face dans un climat tropical, ce qui est l’image type de Teahupo’o que j’ai en tête. »
La vague déferle sur un récif peu profond, ce qui selon Dempfle-Olin offre plus de possibilités de tubes, chose qui se faisait rare aux Jeux panaméricains à Santiago.
Qu’est-ce qui attend les surfeurs canadiens en route vers Paris?
Les Jeux mondiaux de surf ISA auront lieu du 23 février au 3 mars à La Marginal d’Arecibo à Porto Rico.
Le Canada sera représenté par six surfeurs, dont Dempfle-Olin, ainsi que par sa soeur aînée Mathea Dempfle-Olin, qui a remporté une médaille de bronze pour Équipe Canada aux Jeux panaméricains de Lima 2019 dans l’épreuve de longboard.
Cody Young représente aussi le Canada. Il est venu à une victoire près de se qualifier pour la ronde des médailles à Santiago 2023.
Une autre athlète à surveiller sera Erin Brooks, 16 ans. Au mois de juin dernier, alors qu’elle avait 15 ans seulement, Brooks a raflé l’argent en shortboard aux Jeux mondiaux de surf 2023 disputés à El Sunzal, au Salvador. Elle n’a pas été en mesure de participer aux Jeux panaméricains, où Dempfle-Olin a obtenu une place olympique pour le Canada, parce qu’elle n’avait pas encore de passeport canadien. Brooks a toutefois eu le bonheur et la fierté de se voir attribuer la citoyenneté canadienne en janvier.
Les Jeux mondiaux de surf ISA sont la dernière possibilité de se qualifier pour les Jeux olympiques de Paris 2024.