Les sprinteurs canadiens prêts à s’illustrer de nouveau sur la scène internationale
Cet article fait partie d’une série du site Olympique.ca intitulée La course au Canada.
Le Canada est fier de la richesse de son histoire olympique en sprint. Toutefois, les succès en athlétisme qu’a connus la nation n’ont été que passagers, car ses grandes réalisations sont souvent suivies d’une période de léthargie.
Le plus récent calme pourrait bien tirer à sa fin.
Aujourd’hui, la confiance est au menu chez un groupe de jeunes sprinteurs canadiens qui espèrent pouvoir améliorer le sort du Canada dans leur sport. La semaine dernière, ils ont appris la triste nouvelle du décès de leur ami et coéquipier Daundre Barnaby dans un accident de natation. Avant l’incident, il a été question, parmi quatre sprinteurs canadiens, du climat actuel dans le monde de l’athlétisme.
« Les Canadiens peuvent s’attendre à de grandes choses aux épreuves de sprint et pour la nouvelle ère du sprint canadien en général », souligne par courriel Aaron Brown, détenteur du record national au 200 mètres. « Cette nouvelle mouture de coureurs canadiens est très impatiente de connaître du succès, et la plupart d’entre nous sont passés par le système du NCAA qui, selon moi, offre le meilleur climat de préparation pour les jeunes athlètes du Canada. »
Depuis Atlanta 1996 quand Donovan Bailey a dépassé à toute vitesse Frankie Fredericks et Ato Boldon pour remporter la médaille d’or au 100 m à un rythme record, suivi une semaine plus tard d’une convaincante victoire contre le pays hôte au relais masculin 4 x 100 m, le Canada n’a pas gagné de médaille d’or en athlétisme aux Jeux olympiques.
Avec seulement une médaille – une bronze méritée par Priscilla Lopes-Schliep au 100 m haies chez les dames à Beijing 2008 – depuis que Bailey et compagnie ont brillé sur la piste à Atlanta, les sprinteurs, en particulier, ont été durement touchés par la léthargie.
Selon Brown, le système collégial américain, vu l’extravagance des bourses d’études sportives offertes par les plus grands établissements postsecondaires qui attirent de nombreux athlètes des quatre coins du monde, a préparé les coureurs canadiens à se mesurer aux futures vedettes mondiales et olympiques.
« Le fait de passer du temps au sein de la NCAA vous donne un petit avant-goût de ce à quoi cela ressemble de concourir contre la prochaine vague d’athlètes talentueux de calibre international venant de partout dans le monde et cela met tout en perspective », affirme Brown, 22 ans, originaire de Toronto et membre de l’équipe d’athlétisme de l’University of Southern California. C’est lors d’une compétition d’athlétisme de la NCAA en 2014 que Brown a établi la marque de 20,16 secondes au 200 m, éclipsant ainsi le record canadien d’Atlee Mahorn qui remonte à 1991.
« Je ne me suis vraiment pas rendu compte que j’avais brisé un record de si longue date, car au niveau de la NCAA, il faut réaliser des chronos exceptionnels afin de conserver son avantage concurrentiel », explique Brown.
Les meilleurs coureurs et sauteurs du monde sont nombreux à avoir des antécédents sportifs dans les rangs collégiaux aux États-Unis. En revanche, le Canada dispose d’un bassin d’athlètes talentueux capables de prospérer chez eux, comme peut l’attester Khamica Bingham, athlète âgée de 20 ans.
« Je pense tous les jours aux Jeux olympiques à Rio », écrit Bingham, membre de l’équipe d’athlétisme de l’Université York, dans un courriel. « À l’entraînement, lorsque le fardeau du quotidien commence à se fait sentir, je me rappelle toujours à quelles fins servent mes efforts. Quand je suis à la maison, j’imagine de courir en finale du 100 m et du relais 4 x 100 m à Rio, de franchir le fil d’arrivée et de hisser avec étonnement le drapeau canadien, le sourire fendu jusqu’aux lèvres. »
Bingham a couru le dernier segment pour le Canada au Championnat du monde de 2013 à Moscou. L’équipe s’est rendue en finale après avoir atteint un record national pour y arriver. « Après avoir vu le chrono de 42,99 et, ensuite, l’affichage des lettres “NR” juste à côté, nous avons eu l’impression d’avoir gagné une médaille. »
Le fait d’éclipser la marque des 43 secondes au relais permet aux dames canadiennes de faire partie de la conversation au chapitre des médailles à l’approche de Rio, où des remises de témoin impeccables et la confiance peuvent contribuer grandement a l’objectif que se sont fixé les dames de se tailler une place tant convoitée sur le podium. Deux fois championne canadienne en titre au 200 m, Kimberly Hyacinthe, 26 ans, ancienne étudiante de l’Université du Québec, est un autre membre de cette équipe. Hyacinthe a souligné l’importance des améliorations individuelles qui ont permis au Canada de grimper les échelons de l’athlétisme au fil des ans.
« À ce jour, ce que je retiens le plus est la première fois que j’ai éclipsé la marque des 23 secondes au 200 mètres. Cela s’est produit au Championnat national de 2013; je ne m’y attendais pas du tout, d’autant plus que je courais contre le vent. »
Derrière la Jamaïque et les États-Unis, la médaille de bronze est souvent chaudement disputée entre différents pays aux compétitions internationales, mais même les deux premières places ne sont pas garanties si le témoin ne fait pas le tour de la piste. Mais étant donné que Hyacinthe aura à affronter des concurrents dans un avenir plus immédiat, elle ne songe toujours pas aux Jeux olympiques.
« Bien que je n’aime pas regarder trop loin dans l’avenir, les Jeux olympiques sont certainement un objectif que je vise. Je me concentre particulièrement à m’entraîner en vue de réaliser de bonnes performances aux Jeux panaméricains et aux Championnats du monde. » Gavin Smellie est du même avis que Hyacinthe lorsqu’elle parle de la voie qui l’attend. Âgé d’à peine 28 ans et sprinteur de longue date membre de la formation canadienne, Smellie s’est fixé
comme objectif pour cette saison « une médaille aux Jeux panaméricains et aux Championnats du monde à Beijing ».
Smellie était membre de l’équipe de relais 4 x 100 m qui a subi un revers crève-cœur aux Jeux olympiques de 2012 à Londres lorsqu’elle s’est fait ravir la médaille de bronze en raison d’un détail technique. Elle s’est rachetée aux Championnats du monde à Moscou un an plus tard quand la Grande-Bretagne a été disqualifiée à la suite d’un mauvais échange de témoin, à la grande surprise de tout le monde, ce qui a ainsi permis aux Canadiens d’accéder au podium.
« Vous savez, cela a fait naître un sentiment de dévastation chez l’équipe (à Londres) à un moment où nous essayions de montrer que nous sommes parmi l’élite du monde de l’athlétisme; au lieu, nous avons été envahis par la déception. Alors aux Championnats du monde, le fait d’avoir terminé au rang de médaille de bronze et le fait d’avoir dépassé notre chrono précédent ont bel et bien démontré que nous sommes parmi les trois meilleurs pays du monde; c’était tout une sensation. »
Smellie et Brown ont couru les deux premiers segments, cédant ensuite la place à Dontae Richards-Kwok et Justyn Warner, qui a franchi le fil d’arrivée avec un chrono de 37,92 secondes. Avec à sa tête Usain Bolt, la Jamaïque a remporté la médaille d’or avec un chrono de 37,36 secondes, suivie des Américains qui ont capté la médaille d’argent avec un chrono de 37,66 secondes. Le Canada a repris sa place parmi les meilleurs du monde et « espérera remporter une médaille de couleur différente cette fois-ci », à Beijing, s’exclame Smellie.
Face à une grande compétition en sol canadien à Toronto et aux Championnats du monde à Beijing, les sprinteurs canadiens auront une bonne idée de la place qu’ils occupent à l’échelle internationale en 2015. Les Jeux panaméricains donnent également aux spectateurs un regain d’espoir à l’égard d’un programme qui fait des progrès visibles axés sur les résultats grâce à des coureurs phénoménaux.
« Je me rends compte à quel point il est rare de pouvoir concourir contre un bassin d’athlètes de calibre international dans ma ville natale », ajoute Brown, qui qualifie de « l’un des meilleurs moments » de sa carrière la médaille de bronze qu’il a remportée au Championnat mondial junior de 2010 à Moncton, au Nouveau-Brunswick. La plupart des compétitions d’athlétisme de calibre international ont lieu à l’étranger; donc le fait de participer à une course de haut calibre dans ma ville natale – un lieu que j’ai rarement l’occasion de visiter – est spécial. Ce serait un rêve devenu réalité si je pouvais connaître du succès dans ma ville. »
Smellie se dit emballé de pouvoir faire de la compétition devant sa famille et ses amis dans sa ville natale. « Nous avons l’avantage du terrain (de la piste), j’attends avec beaucoup d’enthousiasme la chance d’entendre les encouragements d’une foule partisane. »
Bingham dit qu’elle « vise à remporter une médaille aux Jeux panaméricains, à inspirer les autres et à faire la fierté de son pays » chez elle, où elle recense son père Carl comme étant sa seule source d’inspiration personnelle. Elle peut devoir se mesurer à une coéquipière.
« Ce serait formidable de me tenir debout sur le podium en sol canadien », déclare Hyacinthe, qui a, elle aussi, qualifié de « formidable » l’occasion de courir devant ses proches.
Mis à part le talent et la discipline, la confiance est l’ingrédient clé qui motive les sprinteurs. Le bassin actuel d’athlètes canadiens possède tous les outils en termes de caractère, y compris la confiance inébranlable qui attire les amateurs de sport vers les coureurs.